Paris 2024 : accueillir les Jeux olympiques rime-t-il avec croissance économique

Cet article a été initialement publié en anglais

À l’approche des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, la question est de savoir si les méga-événements sportifs apportent réellement un coup de pouce économique à la ville et au pays d’accueil, ou s’ils ne coûtent pas plus cher qu’ils ne valent.

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De nombreux Parisiens ne sont pas vraiment ravis que leur ville accueille les Jeux olympiques d’été de cette année.

Malgré la volonté du président français, Emmanuel Macron, de faire de l’événement une « fête populaire », les billets à 2 700 euros minimum pour assister à la cérémonie d’ouverture et le coût de plusieurs centaines d’euros pour aller voir presque tous les événements peuvent pour une fois donner aux Français une bonne raison de se plaindre.

Pourtant, beaucoup n’hésitent pas à rappeler le vieil adage selon lequel les J.O. devraient apporter un coup de pouce bienvenu à l’économie française en période d’inflation et de crise du coût de la vie, alors que touristes et investisseurs vont déferler sur la capitale.

Mais les prévisions concernant les retombées économiques des Jeux étant loin d’être certaines, Euronews Business a décidé d’examiner s’ils constitueront effectivement un investissement financier sain pour Paris et la France dans son ensemble.

Un faible taux de retour sur investissement

Les Jeux olympiques passés nous apprennent que l’événement est le plus souvent un gouffre financier.

« En effet, de nombreux hôtes finissent par dépenser beaucoup d’argent pour des infrastructures spécialisées qui ne servent que très peu après l’événement », explique Martin Müller, professeur de géographie et de développement durable à l’université de Lausanne, à Euronews Business.

Il a constaté que l’entretien continu des infrastructures des Jeux olympiques d’hiver de Sochi en 2014 a représenté une charge de plus d’un milliard de dollars (920 millions d’euros) par an depuis lors.

Ce que Martin Müller appelle la « sous-estimation des coûts et la surpromesse des bénéfices » fait que les villes hôtes atteignent rarement le seuil de rentabilité. Dans l’histoire des Jeux olympiques modernes, il a été prouvé qu’il était possible de réaliser des bénéfices, mais ceux-ci ne sont pas comparables à l’importance des déficits.

Le bénéfice record réalisé par Los Angeles, en 1984, s’est produit dans des circonstances particulières : la ville californienne était le seul soumissionnaire et a donc pu obtenir des exigences plus souples de la part du Comité international olympique (CIO), notamment le droit d’utiliser des infrastructures préexistantes au lieu d’en construire de nouvelles.

Un scénario similaire s’est déroulé récemment lorsque Paris et Los Angeles ont été les seules villes encore en lice pour les Jeux.

« Pour éviter que la situation de 1984 ne se reproduise, il [le CIO] a attribué les deux Jeux olympiques en même temps », indique Martin Müller, Paris se voyant attribuer les Jeux de 2024 et Los Angeles ceux de 2028.

Le prix ahurissant de l’organisation des Jeux olympiques décourage en effet de nombreuses villes de se porter candidates, d’autant plus que la candidature elle-même s’avère onéreuse.

« Tokyo a dépensé jusqu’à 150 millions de dollars pour l’échec de sa candidature en 2016, et environ la moitié pour sa candidature en 2020 », expliquent James McBride et Melissa Manno du Council on Foreign Relations (CFR). « Toronto a décidé qu’elle ne pouvait pas se permettre les 60 millions de dollars dont elle aurait eu besoin pour une candidature en 2024 », précisent-ils. 

Un CIO trop puissant ?

Certains experts soulignent la position trop avantageuse du CIO, qui a le pouvoir de choisir parmi les villes candidates et d’imposer des conditions en matière d’infrastructure ou de billetterie que l’hôte doit respecter et payer, tout en partageant peu ou pas du tout les risques financiers auxquels les villes sont confrontées.

« Le CIO pourrait partager un montant plus important de l’argent des sponsors internationaux, télévisuels et de haut niveau », affirme le professeur Andrew Zimbalist, auteur de « Circus Maximus : The Economic Gamble Behind Hosting the Olympics and the World Cup ».

Le CIO perçoit en effet des sommes importantes grâce à ses services de diffusion olympique (OBS), qui jouissent d’un monopole sur les normes de diffusion olympique, ce qui leur permet de dicter leurs conditions aux autres médias. Mais ces revenus ne sont pas partagés avec le comité d’organisation de la ville hôte, qui se retrouve avec une facture de plusieurs milliards de dollars.

Comme l’a rapporté le journal français, Le Monde, en janvier, le puissant OBS a même obtenu un décret temporaire lui permettant d’éviter d’avoir à accorder un jour de congé hebdomadaire, comme l’exige habituellement la loi, aux 8 000 personnes censées travailler à la retransmission des Jeux olympiques de Paris.

Les experts ont suggéré différentes manières de réduire le pouvoir du CIO et son aversion pour le partage des risques financiers.

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« La solution la plus intéressante serait d’avoir un site permanent pour les Jeux d’été et un autre pour les Jeux d’hiver », soutient Andrew Zimbalist.

Mais un tel changement serait-il accueilli avec enthousiasme ? Nombreux sont ceux qui considèrent les Jeux olympiques comme un moyen d’acquérir et d’exploiter un pouvoir d’attraction, et comme un événement qui aide le gouvernement du pays hôte à améliorer son image nationale.

Des opportunités de travail limitées

Lorsque les responsables politiques font la promotion de l’organisation des Jeux olympiques, ils évoquent souvent les possibilités d’emploi, en particulier dans les secteurs de la construction et de l’hôtellerie.

Le comité d’organisation de Paris 2024 affirme que l’événement sera « un levier de relance de l’activité et de l’emploi », grâce à « plus de 181 000 emplois mobilisés ». Il précise que ce chiffre comprend les emplois créés spécifiquement pour l’occasion, et les emplois qui seront impliqués d’une manière ou d’une autre dans les Jeux olympiques, mais qui existent déjà.

Cela signifie que l’effet de ruissellement espéré ne sera pas ressenti par tous.

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« Les salaires versés aux réceptionnistes et aux nettoyeurs de chambres d’un hôtel resteront probablement inchangés », expliquent Robert Baade et Victor Matheson dans leur étude de 2016 intitulée « Going for the Gold : l’économie des Jeux olympiques ».

En effet, dans de nombreux cas, comme « les hôtels (ainsi que les chaînes de restaurants, les agences de location de voitures, les compagnies aériennes et autres entreprises similaires) sont détenus au niveau national ou international, cette augmentation des bénéfices des entreprises ne reste pas dans la ville hôte, mais quitte plutôt la région », expliquent-ils.

Pour que les Jeux se déroulent dans les meilleures conditions, les comités olympiques font également largement appel à des bénévoles – 45 000 cet été à Paris – qui, par définition, ne sont pas rémunérés.

Le bénévolat peut donner droit à quelques avantages, comme celui d’assister gratuitement à certaines compétitions. Cependant, l’absence de salaire signifie qu’il ne sera pas facile de trouver un logement à Paris ou dans sa banlieue, surtout avec la flambée des prix des chambres d’hôtes et des chambres d’hôtel pendant cette période.

Perturbation de la vie quotidienne

Entre l’augmentation temporaire du ticket de métro à 4 euros pour faire face à l’afflux de touristes (il coûte normalement 2,15 euros) et la recommandation de la présidente de la région parisienne, Valérie Pécresse, de travailler à domicile pendant la durée des Jeux olympiques, beaucoup ont l’intention d’utiliser une partie de leurs cinq semaines de congés payés pour quitter Paris en juillet et en août.

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Pour ceux qui ne peuvent s’échapper de la capitale française, ces deux semaines de Jeux olympiques, suivies de deux autres pour les Jeux paralympiques, risquent d’être un cauchemar.

Quant à l’impact sur le tourisme en général, les avis sont partagés.

« Londres, Pékin et Salt Lake City ont tous connu une baisse du tourisme les années de leurs Jeux olympiques« , expliquent James McBride et Melissa Manno du CFR.

En revanche, d’autres villes ont connu une hausse du tourisme après les Jeux olympiques, comme Barcelone au début des années 1990. Toutefois, à l’époque, la ville catalane ne pouvait se comparer à l’attrait actuel de Paris en tant que capitale du pays le plus visité au monde.

« Les touristes olympiques remplaceront en grande partie d’autres touristes qui seraient venus de toute façon », affirme le professeur Martin Müller à propos de Paris. Il estime que l’effet économique des Jeux olympiques sur la capitale française sera probablement négligeable.

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« À Londres, par exemple, des études ont montré qu’il y avait en fait moins de touristes dans la ville pendant les Jeux olympiques de 2012 que pendant les étés précédents », ajoute-t-il.

Ainsi, l’organisation des Jeux n’est peut-être pas l’or olympique que l’on attend d’elle.

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